Découvre les deepfakes avec Ewa Kijak

C'est quoi exactement les deepfakes ? Des images trompeuses, souvent mensongères et fabriquées de toutes pièces. Mais comment et pourquoi ? Ewa Kijak enseigne à l'Université de Rennes, elle est également chercheuse en informatique. Avec elle tu vas en comprendre le mécanisme, mais aussi savoir comment réagir. 

2 questions à Ewa Kijak, enseignante-chercheuse

• Qu'est-ce qu'un deepfake ?

Deepfake, c'est un mot anglais qui a été traduit en français par le terme « hypertrucage ». La 1^re partie c'est deep qui veut dire profond. Et fake qui veut dire faux. Cela désigne n'importe quel contenu : des images, des vidéos, du texte ou de l'audio qui aurait été modifié par un programme qui utilise de l'intelligence artificielle. 

• Est-ce que l'IA est dangereuse ?

L'IA, il faut bien comprendre que c'est un outil. Ça marche plutôt, si je sais m'en servir et que je l'utilise pour couper du pain, il n'y a pas vraiment de danger. En revanche, si je ne sais pas l'utiliser ou si je l'utilise pour faire du mal à quelqu'un, alors là c'est dangereux. 

Comment décrypter les deepfakes ?

Le book d'Ewa Kijak avec le décryptage de 3 vidéos : 

1. Vidéo de La Joconde, la peinture de Léonard de Vinci : on voit tout de suite que c'est truqué, parce qu'un tableau ne bouge pas... Malgré tout c'est bien fait, parce que de près on voit que le fond est craquelé, comme le tableau qui date du XVI^e siècle. Mais en même temps il y a du rap en fond sonore, qui lui est beaucoup plus récent : il s'agit bien d'une vidéo truquée ! On part d'une image qui existe : La Joconde qui est une image et on va venir créer du mouvement, des expressions faciales et on anime son visage pour qu'il s'adapte à un flux audio. 
2. Vidéo d'une jeune femme qui dit ne pas pouvoir donner son nom car son gouvernement lui interdit de parler aux médias étrangers. Il s'agit d'un reportage sur des témoignages de jeunes vivant en Iran qui expliquent ce qui se passe dans leur pays. Il y a vraiment eu quelqu'un qui a filmé une jeune femme à cet endroit-là qui disait ces choses-là. En revanche, la vidéo a été manipulée car on a remplacé son visage par celui d'une autre personne. L'objectif est que l'on ne puisse pas reconnaître la jeune femme qui se met en danger en témoignant. C'est donc pour que l'on ne puisse pas l'identifier. Et sur le documentaire, il y a la mention : « Visage modifié à l'intelligence artificielle ».
3. La vidéo mystère. Diffusée en février 2024 au moment où le président Emmanuel Macron devait se rendre en Ukraine. La visite a été annulée pour des raisons de sécurité. Cette vidéo a alors circulée sur les réseaux sociaux. Elle se présente comme un extrait d'un journal télévisé de la chaîne France 24. Le présentateur annonce que Macron a dû annuler sa visite en Ukraine à la suite d'une provocation meurtrière à son encontre et que la tentative a été stoppée par les services secrets français. Mais en sous-titrage du commentaire du présentateur, il y a des phrases en russe. Deepfake ou non ? Les mouvements de la bouche du vrai présentateur de France 24 sont bizarres et son intonation un peu robotisée. C'est bien un exemple de deepfake que l'on rencontre de plus en plus souvent pour diffuser de fausses informations. Mais pourquoi avoir fait cette vidéo ? :

• Le fait d'utiliser un présentateur d'un JT d'une chaîne d'information connue donne de la crédibilité aux fausses informations que l'on essaie de faire passer pour vraies.
• Faire croire qu'il y a une tentative d'assassinat peut effrayer, et ici faire passer les Ukrainiens pour des méchants qui veulent tuer quelqu'un.
• Cette vidéo a été créée par des Russes mais on ne sait pas exactement par qui. Même si l'on retrouvait l'auteur, on ne pourrait rien faire contre lui, parce qu'il est en Russie et que la loi française ne s'applique pas à lui. 

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